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Obligations de l’éditeur

Publié le : 02/11/2017 14:31:35
Catégories : Droit de l’édition , Propriété intellectuelle

Obligations de l’éditeur

Obligations de l’éditeur

 

Obligations de l’éditeur : La romancière et auteur dramatique Françoise Sagan étant décédée le 24 septembre 2004 en laissant des dettes importantes, en particulier à l'égard de l'administration fiscale, son fils et unique héritier, avait accepté la succession et, désireux de faire revivre l'oeuvre de sa mère qu'il estimait insuffisamment exploitée, a demandé aux Editions J. de lui adresser la liste des contrats en cours.  Reprochant à la société J. d'avoir manqué à son obligation d'assurer à l'oeuvre une exploitation permanente et suivie, outre d'avoir rendu les comptes annuellement et non pas semestriellement et enfin, d'avoir, sans accord préalable de l'ayant-droit, consenti à des sous-éditions en format de poche, l’héritier de Françoise Sagan a poursuivi l’éditeur.  Les juges n’ont pas fait droit aux demandes de l’héritier de Françoise Sagan.  

 

Contrat d’édition 

 

Le contrat d'édition est, au sens des dispositions de l'article L 132-1 du Code de la propriété intellectuelle, le contrat par lequel l'auteur d'une oeuvre de l'esprit ou ses ayants droits cèdent à des conditions déterminées à une personne appelée éditeur le droit de fabriquer ou de faire fabriquer en nombre des exemplaires de l'oeuvre, à charge pour elle d'en assurer la publication et la diffusion. Il s'infère de cette définition que le contrat d'édition a pour objet le transfert par l'auteur de son droit de reproduction avec, en contrepartie, l'obligation pour l'éditeur d'exploiter l'œuvre. 

 

A cet égard, l'éditeur est tenu, selon les prescriptions de l'article L.132-12 du Code de la propriété intellectuelle, d'assurer à l'oeuvre une exploitation permanente et suivie et une diffusion commerciale, conformément aux usages de la profession.  En l’espèce, les contrats d’édition en cause, tous conçus sur un modèle unique, se caractérisaient, aux termes de l'article 1, par une cession de l'auteur à l'éditeur, consentie pour toute la durée de la protection, actuelle et future, instituée au bénéfice de l'auteur, du droit exclusif d'imprimer, publier, reproduire sous toutes formes, en toutes langues, en tous pays, et vendre l'oeuvre à ses frais, risques et périls. Ils stipulaient toutefois que l'auteur recouvrerait  purement et simplement la libre disposition des droits sur l'ouvrage si, l'ouvrage étant épuisé, l'éditeur, après un constat et une mise en demeure de l'auteur d'avoir à le réimprimer, laisse s'écouler un délai d'une année sans y faire droit, sauf circonstances exceptionnelles motivant une extension de délai.  

 

Contrat d’édition et motif légitime d’exploitation limitée de l’œuvre   

 

La société J. a fait valoir avec succès qu’elle avait toujours entretenu des liens très étroits avec Françoise SAGAN, dont elle est l'éditeur historique, et ne contestait pas avoir assuré une exploitation 'a minima' des titres de son fonds sur la période 2001 à 2007, et ce au mépris de ses intérêts d'éditeur. L’éditeur avait invoqué, après avoir rappelé que le contrat d'édition est exécuté dans l'intérêt commun des parties, un juste motif tenant à la situation financière « inextricable » à laquelle l'écrivain se trouvait confrontée. En effet, une exploitation de l'oeuvre conforme aux usages de la profession se serait traduite par une aggravation systématique de l'endettement de l'auteur puisque les revenus tirés de l'exploitation étaient saisis à la source pour apurer le passif fiscal mais n'en étaient pas moins soumis à l'impôt de l'année en cours, générant ainsi de nouvelles dettes et autant de majorations et pénalités. C’était en accord avec Françoise SAGAN qu'elle avait privilégié des modes d'exploitation moins rémunérateurs tels que les formats de poche.

 

Fiscalité de la succession Sagan

 

Il était établi que Françoise SAGAN avait rencontré à compter du début des années 1990, consécutivement à des redressements fiscaux, des difficultés financières qui n'ont fait que s'accroître à telle enseigne qu'elle laissait à son décès un passif successoral important.  Dans un tel contexte, l'écrivain a vu ses revenus,  en 1996-1997  saisis à la source, directement chez ses éditeurs (PLON, J., GALLIMARD). Au décès de l’écrivain, la  direction générale des impôts (direction nationale d'interventions domaniales) faisait connaître à la société J. que suivant acte notarié, Françoise SAGAN avait fait donation entre vifs au Trésor Public de la moitié en nue propriété de l'universalité des droits de reproduction et de représentation sur tous supports en toutes formes et en toutes langues, pour toute la durée de la propriété littéraire, sur les oeuvres énumérées dans l’acte. Cet acte précisait par ailleurs que le donataire serait propriétaire de la moitié des droits sur les oeuvres dès le jour de son acceptation mais qu'il n'en aura la jouissance qu'au jour du décès de la donatrice  et invitait en conséquence l'éditeur à verser au Trésor Public, en droit de percevoir depuis le décès de sa donatrice la moitié des redevances d'auteur générées par l'exploitation de l'oeuvre, la somme lui revenant à due concurrence.

 

Les juges ont précisé que c’était donc de concert, et sans la moindre divergence entre eux, que la société J. et l’héritier ont regardé l'endettement fiscal de Françoise SAGAN comme constituant un obstacle à une exploitation normale de l'œuvre.  C’est de bonne foi, sinon à la demande, à tout le moins avec l'accord de l'auteur puis de son ayant-droit que la société J., compte tenu de l'endettement fiscal avéré de l'auteur, s'est abstenue d'assurer selon les usages de la profession une exploitation permanente et suivie de l'oeuvre et qu'elle a, dans un tel contexte, agi au mieux des intérêts de l'auteur en privilégiant des modes d'exploitation moins rémunérateurs (éditions de poche, collection B.) mais de nature à maintenir l'oeuvre accessible au public et à la préserver de l'oubli.

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