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Déploiement de la fibre optique

Publié le : 23/11/2016 09:40:49
Catégories : Internet | Informatique

Conditions de l’intervention des communes : la carence privée

Attention aux initiatives publiques de déploiement des réseaux de fibre optique par les communes : la carence des opérateurs privés doit être juridiquement établie avant d’agir. Un syndicat de communes a été sanctionné pour plusieurs violations du Code des postes et communications électroniques (CPCE).

L'article L.1425-1 du code général des collectivités territoriales impose aux collectivités territoriales et à leurs groupements de fournir des services de communication électroniques aux utilisateurs finaux que s'il est constaté une insuffisance d'initiatives privées susceptibles de satisfaire les utilisateurs finaux et après information de l'ARCEP (depuis la loi n°2016-1321 du 7 octobre 2016, l’insuffisance d'initiatives privées est constatée par un appel public à manifestation d'intentions déclaré infructueux ayant visé à satisfaire les besoins concernés des utilisateurs finals en services de communications électroniques).

Dérogation au constat de carence

Il existe une dérogation à cette obligation de constat de la défaillance de l'initiative privée au profit des réseaux établis et exploités par les collectivités territoriales : la distribution de services de radio et de télévision lorsque ces réseaux ont été établis avant la date de promulgation de la loi n°2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique (LCEN). Or, si le syndicat de communes a décidé de rénover son réseau câblé de télédistribution postérieurement à la LCEN, il ne peut bénéficier de cette dérogation.

A partir du moment où le syndicat de communes souhaite  faire évoluer son réseau câblé vers la fibre optique, celui-ci opère un changement de la nature de son réseau aux termes duquel il doit se soumettre au dispositif prescrit par l'article L.1425-1 du code général des collectivités territoriales. Cette analyse est conforme à l'ouverture à la concurrence du marché des télécommunications entrée en vigueur le 1er janvier 1998 dans la mesure où elle constate le bien-fondé de la concurrence à travers l'égalité de traitement à réserver à tous les opérateurs afin d'éviter la constitution d'un monopole au profit d'un opérateur déjà en place et disposant des infrastructures originelles.

Aussi légitime que soit le projet d’un syndicat de communes de faire bénéficier les habitants de son territoire des améliorations technologiques en matière de communications électroniques, il reste soumis à l'obligation de constater une carence de l'initiative privée.

Droit d’accès de l’opérateur Orange

Dans cette affaire, le syndicat de communes a également été condamné pour n’avoir pas mis l’opérateur Orange en situation d'adhérer à un contrat d'accès à la fibre optique valide.

Il s'évince de l'article L.34-8-3 du CPCE « Toute personne établissant ou ayant établi dans un immeuble bâti ou exploitant une ligne de communications électroniques à très haut débit en fibre optique permettant de desservir un utilisateur final fait droit aux demandes raisonnables d'accès à ladite ligne et aux moyens qui y sont associés émanant d'opérateurs, en vue de fournir des services de communications électroniques à cet utilisateur final. ».

L'ARCEP (décision n°2009-1106 du 22 décembre 2009 et n°2010-1312 du 14 décembre 2010), impose à l'opérateur d'immeuble (en l’occurrence le syndicat de communes), de mettre à la disposition des autres opérateurs les ressources nécessaires associées à la mise en oeuvre effective de l'accès dans des conditions raisonnables et non discriminatoires.et notamment, l'hébergement au point de mutualisation et les conditions garantissant la disponibilité d'infrastructures d'accueil et l'accessibilité des opérateurs' pour le raccordement du réseau de boucle locale au très haut débit.

Il appartient à l'opérateur d'immeuble de dimensionner et localiser le point de mutualisation lui-même dès l'amont de telle manière qu'il puisse spécifier dans l'offre d'accès les éléments techniques des équipements de son réseau impactés par l'accès de l'opérateur tiers ou par l'hébergement de ses équipements. S'il avait adopté pareille démarche, le syndicat de communes aurait permis le raccordement des réseaux d'opérateurs tiers dans des conditions économiques et techniquement raisonnables, eu égard aux spécificités de l'habitat local et des liens de raccordement distant disponibles.

Défaut d’information du syndicat de communes

Il a été jugé qu’Orange a pâti de la défaillance du syndicat de communes dans la transmission des informations relatives à la route optique utilisable, c'est à dire des informations comprises dans son système informatique grâce auxquelles l'opérateur tiers peut repérer la fibre informatique qu'il peut utiliser pour ses clients éventuels, utilisateurs finaux.

Après avoir admis le sous-dimensionnement des armoires permettant les points de raccordements optiques (PRO) le syndicat de communes a soutenu à tort que les têtes de réseau (TDR) étaient de taille suffisante pour accueillir les équipements d’Orange.

Outre l'impossibilité technique pour Orange d'accéder au réseau FttH, le syndicat de communes n'a pas répondu de manière satisfaisante aux éléments demandés relatifs à la définition des conditions d'accès à son Web Services, au délai de fourniture des routes optiques, à la transmission d'une annexe tarifaire exhaustive de son contrat d'offre d'accès, à la tarification du réseau bi-fibres et aux conditions auxquelles elle peut bénéficier des conditions de co-financement.

Tant techniquement que juridiquement, le syndicat de communes a violé les règles de droit qui régissent le libre accès aux réseaux de communications électroniques et, en exigeant un dépôt financier préalablement à la négociation, a violé le principe de l'équilibre contractuel.

Pratiques anti-concurrentielles établies

La société Orange étant toujours privée de la faculté d'accéder au réseau FttH du syndicat de communes alors que ce dernier continue de commercialiser ses offres sur le marché de détail (offre Tubeo), le syndicat de commune a aussi contribué à maintenir, voire à aggraver la situation d'une concurrence déséquilibrée susceptible de causer un préjudice aux opérateurs tiers.

L'effet direct des atermoiements du syndicat de communes a engendré un risque de distorsion concurrentielle pouvant se traduire par une double conséquence : i) d'une part, Orange n’était pas  en mesure d'obtenir de nouveaux clients et, d'autre part, ii) il existait une sérieuse potentialité de voir les abonnés qu'elle avait avec le système ADSL l'abandonner au profit de l’offre du syndicat de communes, afin de profiter de la technologie plus performante du très haut débit proposée par ce seul opérateur.

A noter que l’ARCEP a rendu sur ce contentieux une décision n°2014-08444 du 22 juillet 2014, exécutoire nonobstant appel, constatant les manquements du syndicat de communes. La teneur de cette décision a constitué une circonstance nouvelle renforçant le caractère manifestement illicite du trouble (Cass. Com. 25 novembre 2014, n° de pourvoi : 13-27683).

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